samedi 1 septembre 2012

Immigration et communautés culturelles - Vers une politique de lutte contre le racisme et la discrimination


Immigration et communautés culturelles - Vers une politique de lutte contre le racisme et la discrimination

« On ne peut pas se permettre de garder des gens en marge de la société alors qu'ils ont été sélectionnés pour leurs compétences »

Thierry Haroun   18 octobre 2006 
Lise Thériault, ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles. Source: MICC
Lise Thériault, ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles. Source: MICC
D'ici 2009, il y aura 680 000 emplois à pourvoir au Québec. Afin d'honorer ce défi de taille, l'État québécois a, par l'entremise notamment du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (MICC), procédé à la mise en place de diverses mesures et à l'adoption d'une nouvelle législation.

Québec adoptait en juin dernier un projet de loi modifiant le Code des professions. On rendait ainsi possible la délivrance d'un permis ou d'un certificat de spécialiste au titulaire d'une autorisation d'exercer une profession en dehors du Québec, tout en satisfaisant aux conditions prévues par règlement de l'ordre professionnel contrôlant l'exercice de cette profession au Québec. Le permis restrictif était aussi autorisé aux mêmes conditions.

Un ordre doit donc maintenant aussi déterminer une procédure de reconnaissance d'une équivalence dont les normes sont fixées par règlement. Cette procédure doit prévoir la révision de la décision par des personnes autres que celles qui l'ont rendue.

Ce dernier point est une avancée notable aux yeux de la ministre du MICC, Lise Thériault. Car désormais, «chacun des ordres professionnels va se doter d'une instance de révision indépendante», se réjouit-elle. Il faut savoir que, si auparavant les ordres professionnels s'étaient dotés de mécanismes de révision des décisions pour les cas où la reconnaissance de l'équivalence de diplôme, de formation ou de stage a été refusée, il reste que la révision des décisions n'était pas effectuée par un comité indépendant (Le Devoir, 15 octobre 2005).

Dans son ensemble, «ce projet de loi offre maintenant la possibilité aux 50 professions régies par les 45 ordres professionnels du Québec d'émettre différentes catégories de permis», précise Lise Thériault, ce qui, de fait, change la donne — pour le mieux — au titre de l'intégration des personnes immigrantes au marché du travail.

À la suite d'un rapport

L'esprit de ce projet de loi découle directement du rapport de l'équipe de travail sur la reconnaissance des diplômes et des compétences des personnes formées à l'étranger qui a été remis à la ministre Thériault le 5 décembre 2005. Le mandat confié à cette équipe de travail a été notamment de circonscrire les principales difficultés qui empêchent de reconnaître plus rapidement la formation et les compétences des personnes formées à l'étranger et d'émettre des recommandations.

Ces recommandations — et elles sont nombreuses — portent notamment sur l'accès à l'information, la reconnaissance des acquis, l'accès à la formation d'appoint, l'aide financière, le soutien aux intervenants concernés et l'intégration professionnelle. La majorité de ces recommandations a déjà été mise de l'avant par le MICC, indique la ministre Thériault.

Ce document note qu'en 2006, le Québec accueillera entre 46 200 et 48 200 immigrés, par rapport à 37 500 en 2001. L'immigration, indique-t-on, est actuellement la principale source de croissance de la population active au Québec, et elle en constituera la totalité d'ici dix ans. En outre, 56,9 % des immigrés âgés de 15 ans et plus qui ont été admis au Québec de 1999 à 2003 comptaient 14 années ou plus de scolarité, alors que, pour l'ensemble de la population québécoise, cette proportion atteignait 36,7 %.

Reconnaître l'expérience acquise

Ces chiffres ne sont pas étrangers aux nouvelles mesures établies par le MICC, qui visent une meilleure intégration des immigrés à la société québécoise, et à la sanction du projet de loi modifiant le Code des professions concernant la délivrance des permis, admet la ministre Thériault. «À l'évidence, les ordres professionnels ont pour mandat de protéger le public, mais ces mêmes ordres ont aussi compris qu'ils ne pouvaient pas mettre en danger la sécurité du public en refusant de reconnaître l'expérience acquise à l'étranger par les personnes immigrantes. Si cela prend une mise à niveau, les ordres professionnels sont prêts à le faire. Et nous [le gouvernement du Québec] avons maintenant les moyens nécessaires pour répondre à la demande de formation d'appoint et de francisation, entre autres.»

Par exemple, poursuit Lise Thériault, «dans le cas des acupuncteurs, nous avons financé un programme visant à développer des mécanismes de collaboration avec la Chine par le biais de stages personnalisés en clinique privée de nature à les préparer à l'Ordre des acupuncteurs. C'est un peu utopique [sic] de dire qu'un acupuncteur en provenance de Chine ne pouvait pas pratiquer ici!».

Intégration réelle

Élaboré conjointement par le MICC et Emploi-Québec et mis sur pied l'année dernière, le Programme d'aide à l'intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi (PRIIME) est une autre mesure qui vise à soutenir l'insertion en emploi et à lutter contre la discrimination. Ce programme propose des mesures d'aide à l'emploi aux petites et moyennes entreprises qui veulent développer leurs habiletés en gestion de la diversité culturelle et embaucher des personnes immigrantes nouvellement arrivées ou issues des minorités visibles.

Les emplois admissibles sont des emplois réguliers à temps plein. À ce jour, plus de 800 participants ont pu bénéficier du soutien de ce programme, qui est financé à même une partie des revenus de placements générés par le PRIIME. «En fait, dit Mme Thériault, ce programme permet à une personne de vivre une première expérience de travail en sol québécois.»

Par ailleurs, le MICC a conclu récemment une entente de partenariat avec la Fédération des chambres de commerce du Québec, qui encadre un programme de sensibilisation et de mise en valeur de la main-d'oeuvre immigrante auprès des entreprises. «Les entrepreneurs vivent une pénurie de main-d'oeuvre et plus le temps passe, plus le problème va s'accentuant, fait remarquer Mme Thériault. Et l'un des volets de cette entente offre la possibilité à une cinquantaine de chambres de commerce locales ou régionales de dispenser des formations à des entreprises. Ces formations ont pour but de démontrer ce qu'est la gestion de la diversité culturelle, histoire de réduire les tabous, qui découlent souvent de la méconnaissance.»

Et le gouvernement du Québec compte bien faire barrage à ces tabous avec l'adoption «au printemps prochain» d'une politique de lutte contre le racisme et la discrimination, affirme la ministre Thériault. «Cette politique va interpeller [re-sic] tous les ministères de notre gouvernement et tous les acteurs de la société.» Une politique qui entrera en vigueur dans un contexte «de pénurie de main-d'oeuvre. Et on ne peut pas se permettre de garder des gens en marge de la société alors qu'ils ont été sélectionnés pour leurs compétences».

Collaborateur du Devoir

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